Publié le Jeudi, 19 Mai 2016, dans la catégorie
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Dès le début de la mobilisation des médecins contre la loi Santé, le SNJMG, dubitatif sur la pertinence du tiers payant proposé par la ministre de la Santé, s'était prononcé en faveur de la suppression du ticket modérateur en Médecine Générale.
Le 22 février 2016, le SNJMG s'est joint à MG-France et au SMG pour demander au gouvernement l'exonération du ticket modérateur en soins de santé primaires :
Monsieur le Président de la République,
Monsieur le Premier ministre,
Madame la ministre,
Le système de sant syndé français est organisé autour d’une assurance maladie obligatoire (AMO), mutualisée car financée par une cotisation assise sur les revenus, sans sélection du risque individuel, et autour d’une assurance maladie complémentaire (AMC) facultative à la charge personnelle de chaque citoyen, couvrant la part des soins non prise en charge par l’AMO, le ticket modérateur (TM). Cette situation crée un lien entre la situation financière de chaque citoyen et le niveau de protection maladie dont il bénéficie.
Notre pays ne cesse depuis la création du TM, de créer des dispositifs de rattrapage des inégalités d’accès à une protection maladie complète qui en découlent, et qui créent ou aggravent les inégalités sociales pour l’accès aux soins. Ces systèmes, la couverture maladie universelle (CMU), l’aide à la complémentaire santé (ACS), d’une part, ne couvrent pas la totalité de la population qui pourrait en bénéficier, d’autre part, ils sont incomplets avec des effets de seuil, par exemple pour les travailleurs pauvres. Notre pratique de soignant qui nous amène à questionner la position sociale de nos patients, confirme que le ticket modérateur crée ou aggrave les inégalités sociales de santé (ISS), par les conséquences qui en découlent sur le parcours de soins et de santé.
La couverture du risque maladie est plus efficace et moins coûteuse avec la mutualisation du risque (l’assurance maladie obligatoire en est le parfait exemple), que par la sélection du risque. Le ticket modérateur couvert par un système de mutualisation est devenu l’exception (peu de mutuelles demandent une cotisation assise sur les revenus), et il introduit à travers l’âge du cotisant, un premier niveau de sélection du risque. Notre pratique montre en ambulatoire une augmentation importante du reste à charge (RAC) des patients après remboursement par l’assurance maladie obligatoire : le RAC est aujourd’hui hors affection de longue durée (ALD) de 45%. Ainsi, et sans débat public, le principe assurantiel de sélection du risque ne cesse de grignoter le principe de la mutualisation du risque.
Il faut désormais que notre pays prenne conscience de cette évolution, et que ce débat s’ouvre publiquement, d’autant que l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013 introduit une quasi obligation d’une protection complémentaire, et que celle ci doit à notre sens questionner de façon exigeante ce principe de la mutualisation, car elle permet de maintenir un principe qui nous le pensons, reste la base du pacte social français, la solidarité face à la maladie.
Vous avez écrit dans la loi de santé à l'article 1, « La politique de santé relève de la responsabilité de l’Etat. Elle tend à assurer la promotion de conditions de vie favorables à la santé, l’amélioration de l’état de santé de la population, la réduction des inégalités sociales et territoriales et l’égalité entre les femmes et les hommes et à garantir la meilleure sécurité sanitaire possible et l’accès effectif de la population à la prévention et aux soins. »
Conscient de cet enjeu que nous partageons, et face à l’appauvrissement croissant de nombreuses familles, au développement de la précarité, du chômage, du mal ou du non logement, etc ..., nous avons décidé de vous interpeller en vous proposant une mesure concrète, simple et équitable, la suppression du ticket modérateur, en commençant par les soins de santé primaires : consultations et prescriptions du médecin traitant, soins assurés par les autres professionnels de santé de proximité.
Cette suppression doit s’accompagner du transfert des cotisations correspondantes sur la couverture par l’AMO, ce qui en fait une réforme neutre quant aux cotisations qu’il faudrait en outre asseoir sur les revenus, et elle produira en plus une économie de gestion dont l’exemple est connu de tous : le régime local d’assurance maladie (RLAM) d’Alsace Moselle, non déficitaire grâce aux économies de gestion (les coûts de gestion de ce régime local, adossé à la Sécurité sociale, sont de 1,2% alors qu'ils sont de 20% en moyenne au sein des complémentaires santé privées). Ce transfert de couverture, peut aussi être réalisé en ouvrant aux régimes obligatoires, la possibilité de couvrir le risque complémentaire, comme cela existe cette fois dans l’assurance maladie classique pour la CMU complémentaire (CMUc)
La suppression du ticket modérateur a de nombreux avantages sur le système de soins:
- amélioration de l'accès aux soins de santé primaires de tous, et des populations les plus en difficulté en particulier, facilitant la dispense totale d'avance des frais, dont ils bénéficient.
- fléchage clair du système de santé sur les soins primaires, ce qui limiterait l’utilisation inappropriée des soins à l’hôpital, par exemple l'engorgement des urgences hospitalières
- en cas de tiers payant, règlement financier simplifié des professionnels uniquement par le RO, ce qui diminue le temps administratif et augmente le temps médical, d’autant que les régimes complémentaires dans le rapport qu’ils viennent de co-écrire ont délibérément écarté toute collaboration avec les régimes obligatoires dans le dossier tiers payant. Confirmant leur inscription croissante dans un marché et non plus dans un système de santé, force est de constater que les lois du marché sont leurs règles, contrairement aux soignants, et au souhait de la population dans ce domaine.
- renforcement in fine de la solidarité et de la justice sociale, garants de notre pacte social et républicain, et en partie de la paix sociale.
La population est unanime dans sa volonté de maintenir le principe de la solidarité face à la maladie comme base du pacte social et républicain, ce pacte de solidarité doit redevenir la règle pour la totalité de la couverture maladie.
C’était la logique du programme du Conseil national de la résistance. Cependant en créant un ticket modérateur qui ne modère pas du tout la dépense de santé, celui-ci a en partie manqué sa cible. Il convient donc en supprimant le ticket modérateur d’aller au bout de cette logique, la solidarité face à la maladie dans notre pays.
En l'absence de réponse, les trois syndicats ont tenu ce jour une conférence de presse pour expliquer les motivations de leur démarche :
NB : Vous pouvez soutenir cet appel en signant la pétition sur le site Internet de MG France