Nous connaissons tous ces jouets bas de gamme, produits à coût dérisoire, qui visent à orienter la consommation des jeunes générations. Voici le dernier né de la série, LE gadget de l’étémade in Ministère de la Santé : les contrats de praticiens territoriaux en Médecine Générale...
En ce 15 août, la parution au JO des arrêtés précisant la mise en oeuvre de cette mesure, annoncée en décembre dernier par Mme Marisol Touraine, confirme toutes les appréhensions initiales du Syndicat National des Jeunes Médecins Généralistes (SNJMG).
Le principe serait de faire venir 200 jeunes médecins dans certains territoires souffrant de désertification médicale en leur assurant “un revenu brut mensuel [...] de 6900 €”. Bien sûr, ce montant important frappe l’imagination du public... et en cas d’échec, on va s’empresser de nous dire qu’il faut passer à des mesures plus coercitives... Or s’il est bien conçu pour communiquer dans les médias et amadouer les élus locaux, le dispositif est en fait un miroir aux alouettes.
En effet, plusieurs mécanismes interviennent de telle sorte que l’engagement public reste objectivement a minima :
● Un quota de recettes à produire par le médecin (3795 € minimum par mois), ce qui correspond à une moyenne de 8 actes par jour. Notre expérience de remplaçants et des jeunes installés montre que ce seuil peut se révéler difficile à atteindre. Finalement ce dispositif exclura précisément ceux qui en auraient le plus besoin ! Ou alors inciterait on ces jeunes docteurs à faire du porte à porte ?
● Une rémunération complémentaire exprimée en honoraires bruts. Or on sait bien que les charges d’un médecin représentent en moyenne 50 % des recettes brutes. Nous pouvons donc ramener le revenu minimal garanti, net avant impôts, à environ 3450 € (le site du Ministère des Affaires Sociales et de la Santé avance le chiffre de “3460 €”).
● Une durée maximale de 2 ans. Ce qui correspond précisément au décalage dans le paiement des charges ! Sur les recettes brutes, qu’elles soient produites par lui même ou complétées par l’ARS, le jeune médecin devra bien entendu payer des charges sociales (allocations familiales, CSGCRDS, cotisation retraite...). Or la plupart des organismes préleveurs (URSSAF, CARMF...) opèrent leurs régularisations, parfois massives, en année n+2. Avec la disparition du complément de recettes et l’envolée des charges, la houle risque d’être forte pour le jeune praticien et son cabinet...
Notons que si en décembre dernier Madame Tourraine affirmait que 55.000 € annuels nets lui semblaient la rémunération “normale” pour un jeune docteur en médecine, neuf mois plus tard le calcul n’aboutit plus qu’à 41.400 €, en supposant bien sûr que le praticien territorial travaille douze mois de l’année, sans prendre de vacances !
On nous objectera peut être que l’intérêt résiduel de ce contrat serait une protection sociale un peu moins mauvaise que celles des autres médecins non salariés...
Franchement, n’est ce pas un minimum ? Surtout quand on met ça en balance avec la prise de risque de ces jeunes au service de la collectivité. Quoi qu’il en soit, quelle catégorie de travailleurs trouverait mirifique une prise en charge des arrêts de travail à partir du 7ième jour seulement ? Peut être les médecins, habitués à leurs 90 jours de carence ! Quant à la couverture des accidents du travail, on attendra encore. Ce sont ces conditions de travail insécurisantes qui doivent être modifiées prioritairement si on ne veut plus voir les jeunes médecins fuir l'installation et les plus anciens cesser prématurément leur activité.
Le praticien territorial serat il l’arbre qui cache la forêt du démembrement de la médecine de proximité ? Ou bien le gouvernement va t il enfin opérer la révolution copernicienne indispensable pour remettre notre système de Santé sur ses pieds ? Le SNJMG souhaite de réelles mesures et fera entendre ses propositions à l’automne.
Auteurs : Conseil National et Bureau du SNJMG
Contact Presse : Docteur Théo COMBES,
president@snjmg.org
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