Aides à l’installation de médecins : le bilan globalement négatif des contrats de praticiens territoriaux

 

Le Dr Sophie Augros, déléguée nationale à l'accès aux soins, a remis, lundi 16 septembre 2019, à Mme Agnès Buzyn, ministre de la Santé, un état des lieux des aides à l'installation des jeunes médecins dans les territoires sous dotés.

Bien qu’ayant participé aux réunions préparatoires en tant que premier syndicat dans l’histoire à représenter spécifiquement, outre les internes, les médecins remplaçants et les jeunes installés en Médecine Générale, le Syndicat National des Jeunes Médecins Généralistes (SNJMG) s’étonne de ne pas avoir reçu ce rapport et que ce rapport ne soit pas disponible sur le site Internet du ministère de la Santé.

C’est donc sur la base d’articles de presse et des éléments que nous avons recueillis lors de notre participation aux réunions de travail, que nous livrons une première analyse sur les contrats de praticiens territoriaux dont notre syndicat avait dénoncé, dès leur création, leur caractère de « gadget » (1).

Premier contrat créé en 2013, le contrat de Praticien Territorial de Médecine Générale (PTMG) affiche des résultats peu convaincants. Selon les estimations citées dans le rapport, il y aurait eu 1208 contrats cumulés entre janvier 2013 et avril 2019. Le premier enseignement de ce résultat est que le nombre de contrats signés est resté à un bas étiage : il est passé de 123 contrats signés en 2013 (NB : Marisol Touraine annonçait 180 contrats signés pour l’année 2013) à 225 en 2015 avant de refluer à 207 en 2018 (alors qu’à titre de comparaison, les promotions d’internes de Médecine Générale ont dépassé les 3400 personnes par an, entre 2012 et 2018). De plus, ce contrat peine à rivaliser avec l’aide conventionnelle à l’installation (moins de 8% de recours au PTMG contre 68% de recours au CAIM - Contrat d’Aide à l’Installation Médecin), alors que celle-ci est plus récente (2017 contre 2013) et qu’elle ne bénéficie pas du même engagement de l’Etat (campagnes promotionnelles au niveau du ministère et des ARS).

Au-delà de ces réalités comptables, il faut étudier le profil des signataires du PTMG. Sur un échantillon de 150 signataires, seuls 2/3 des bénéficiaires étaient remplaçant-e-s (et non installé-e-s) lors de la signature. Et sur ce même échantillon, il y avait 8% de signataires du CESP (2), c’est-à-dire d’étudiant-e-s qui s’étaient déjà engagé-e-s à s’installer en territoire sous doté via leur CESP.  Ansi, le nombre de jeunes médecins qui, entre janvier 2013 et avril 2019, se sont installés en territoire sous doté du seul fait du contrat PTMG est sensiblement plus faible que les 1208 revendiqués. Enfin, ce contrat a surtout constitué pour les signataires une sécurité financière leur permettant de s’installer plus tôt que prévu (3). Tout ceci faisant plus penser à un effet d’aubaine qu’à un véritable effet incitatif.

Concernant les autres contrats de praticiens territoriaux, l’énoncé des résultats se passe de commentaire : PTMA (praticien territorial de médecine ambulatoire), 71 signataires et PIAS (praticien isolé à activité saisonnière), 9 signataires.

Un mot toutefois sur le PTMR (Praticien Territorial Médical de Remplacement) : 19 contrats signés sur 200 contrats par an proposés entre 2017 et 2018, soit 4.75 % de contrats ayant trouvés preneurs. Dire que Mme Marisol Touraine avait présenté à l’Assemblée Nationale cette mesure comme étant une réponse à une demande des médecins remplaçants : ces chiffres, après les critiques du SNJMG, prouve qu’il n’en était rien…

En toute logique, le Dr Sophie Augros propose à la ministre de ne pas renouveler ces contrats ; c’est bien sûr une proposition que soutient le SNJMG.

Quant à la proposition de les remplacer par un contrat unique revisité, c’est peut être une délicate attention à l’égard de tous les responsables qui s’étaient impliqués dans cette politique de contrats territoriaux mais le SNJMG rappelle sa préférence pour une amélioration d’ensemble des conditions d’installation et d’exercice des Médecins Généralistes avec des modulations positives en fonction du lieu d’exercice.

 

Dr Sayaka Oguchi presidente@snjmg.org – 07.61.99.39.22

 

  1.  : Communiqué du SNJMG sur la création du PTMG
  2.  : Le CESP est bourse d’étude offerte aux étudiants et internes en médecine ou en dentaire en contre partie d’une installation en zone sous dotée (3 185 étudiants ou internes signataires depuis 2010, soit environ 398 par an alors que les promos en médecine dépassent 8000 personnes par an)
  3.  : « Le PTMG n'a pas influencé mon lieu d'installation car je savais que je voulais m'installer dans ce village. J'ai d'abord choisi où je voulais m'installer, puis ensuite s'il y avait des aides ou non. Sans cette aide je pense que je ne me serais pas installée directement : j'aurais fait des remplacements multiples avant pour avoir une sécurité financière. » Une signataire du contrat PTMG citée dans le rapport